Dans un monde affecté par le changement climatique, votre prochain repas pourrait avoir un goût différent, l’impact environnemental se répercutant potentiellement même sur vos aliments préférés.
De la disparition des glands au changement du goût des jambons
Au cœur de l’Espagne, des cochons de race ibérique noire fouillent le sol sous le couvert des chênes centenaires en quête de glands. Ces animaux donneront naissance à ce que nous connaissons sous le nom de jambon pata negra, connu internationalement pour son goût unique. Toutefois, ce goût singulier est menacé par le réchauffement climatique. Cinco Jotas, un producteur de renom de ce jambon, témoigne de l’effet du changement climatique sur son produit. Avec les sécheresses et vagues de chaleur répétées, les glands deviennent de plus en plus rares, compromettant la qualité et la saveur de la viande. María Castro Bermúdez-Coronel, directrice de communication de Cinco Jotas et biologiste, illustre l’impact de ces phénomènes : « Quand on dépend complètement de ressources naturelles, on ne cesse de penser, d’observer et d’essayer de prévoir comment cela va se passer. »
Le terroir : une notion en péril
Dans le monde du vin, « terroir » définit comment le sol et le climat influencent le goût du raisin. Cette notion s’applique de la même façon aux cochons ibériques de Cinco Jotas. Kathryn De Master, chercheuse en ressources environnementales à l’université de Californie, explique que le terroir regroupe les facteurs écologiques et sociaux qui contribuent à la qualité et le goût de nos aliments. Si le changement climatique affecte l’environnement, alors il perturbe également le terroir, menaçant le goût de nos aliments.
Commerce aromatique : un équilibre fragile
Cette interdépendance entre le terroir et le climat est bien représentée en Caroline du Nord, où la compagnie Hold Fast Oyster Co. cultive des huîtres. Avec la montée des eaux et l’augmentation de la salinité due au changement climatique, Matt Schwab, le propriétaire, note déjà un déclin de la saveur subtile des huîtres. Ces modifications ont des retombées sociales importantes. Les producteurs de thé en Chine, par exemple, ont noté une diminution de 30 % à 50 % de leurs revenus suite à la perte de qualité due à l’augmentation des températures.
Un futur gustatif hasardeux
Notre futur alimentaire menacé par le changement climatique est incertain, surtout pour les petits exploitations. En Caroline du Nord, Matt Schwab envisage diverses options pour conserver la qualité de ses huîtres. Chez Cinco Jotas, on réfléchit déjà à comment faire face à cette éventuelle disparition des glands. Castro Bermúdez-Coronel reste pourtant optimiste : « La nature s’adapte à tout. Elle se transformera, mais elle s’adaptera. La nature s’adapte toujours aux nouveaux changements. ». Mais la question demeure : nous adapterons-nous, nous gastronomes, à ces nouveaux goûts modifiés par la nature ?
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