Seconde cause de décès après les maladies cardiovasculaires aux États-Unis, le cancer fascine autant qu’il effraie patients, praticiens et industrie du médicament. Principale cause de mortalité féminine dans nombre de pays développés ou non, la recherche autour du cancer du sein était au point mort jusqu’à cette découverte du National Cancer Institute (NCI) américain. Ce dernier est semble-t-il parvenu à guérir une patiente à qui il ne restait plus que quelques mois à vivre. Totalement débarrassée de son cancer, la miraculée souhaite conserver l’anonymat.
En gros c’est quoi le cancer ?
Le corps humain compte plus de 6 milliards de cellules qui, au gré des jours, mois, années, meurent et se renouvellent. En fonction de leurs durées de vie respectives. C’est le cycle cellulaire. Malheureusement, durant leur phase de renouvellement certaines cellules peuvent voir leur matériel génétique contenu dans l’ADN être altéré. Cette altération est principalement causée par des mutations génétiques.
Les mutations génétiques induisent du coup une modification du matériel génétique des cellules nouvellement formées. Ces dernières peuvent aboutir à la création d’une cellule qui dégénérera tout simplement. Ou évoluer au contraire vers la une cellule à dessein tumoral. Ce dessein étant essentiellement une multiplication anarchique (désordonnée) de cellules de mauvaise qualité (entendez : dont le matériel génétique a été altéré).

À mesure que ces cellules se multiplient et croissent, elles forment un amas cellulaire. Au bout du compte cet amas devient par la force de la biologie une masse tumorale. Qui peut être bénigne (n’envahit pas les organes voisins, se limite à l’organe dont elle est issue) ou maligne (envahit la région, les organes voisins et poste des métastases dans d’autres parties du corps).
La maladie causée par l’un ou l’autre des types de masse porte le nom de cancer. La différence se situant sur le pronostic plus réservé dans le cas des cancers à masse tumorale maligne.
Pourquoi est-il si complexe à traiter ?
La réponse à cette question est en effet multifactorielle. D’une part le traitement du cancer est rendu complexe du fait du nombre conséquent de gènes contenus dans notre ADN. Ce qui par ricochet signifie qu’il y a autant de mutations possibles. Du coup, il est difficile voire impossible de trouver un seul et unique traitement capable de guérir tous les types de cancer.
Secondairement, les chances de succès d’un traitement contre le cancer sont aussi fonction du stade d’avancement de la maladie au moment où elle est prise en charge. Ces chances dépendent entre autres du sexe, de l’âge et surtout du profil immunologique du patient (système immunitaire compétent ou non). Ou même de la réponse de l’organisme au traitement. D’où l’intérêt d’un dépistage précoce.
Ce qui fait du cancer l’une des maladies les plus complexes à prendre en charge de nos jours. Toutefois, un espoir renait grâce à ce nouveau traitement mis en place par les équipes du docteur Rosenberg, de l’Institut national du cancer aux États-Unis.
En quoi consiste la nouvelle démarche thérapeutique américaine ?
S’appuyant sur une vision plus personnalisée du traitement du cancer, la nouvelle démarche thérapeutique testée par le docteur Rosenberg et ses collègues se base en effet sur une étude comparative du génome de la tumeur. Elle prend donc ses racines sur l’immunothérapie.
Une fois la tumeur localisée, quelques cellules de cette dernière sont prélevées. Afin de déterminer et localiser les mutations ayant conduit à la formation de la masse tumorale. Une fois cela fait, un prélèvement de cellules d’un tissu sain du même patient est effectué. Ensuite, une comparaison pure et simple des génomes des deux types cellulaires est réalisée.

La mutation confirmée, des lymphocytes susceptibles d’anéantir les cellules portant l’aberration génétique sont synthétisés en laboratoire. Ils portent le nom de lymphocytes infiltrant les tumeurs (TIL). Les TIL sont ensuite injectés dans l’organisme du patient. Outre le fait d’être une réponse plus ciblée à la maladie, cette méthode est également porteuse de meilleures chances de guérison.
Elle revêt cependant un inconvénient. Elle nécessite absolument une prise en charge plus personnalisée. Elle ne peut donc pas être implémentée de manière standardisée pour lutter à grande échelle contre le cancer.
Pour quels résultats ?
Deux essais cliniques non liés ont été menés sur deux groupes de patients. Un groupe constitué d’une unique patiente atteinte d’un cancer du sein métastatique au stade terminal. Et à qui il ne restait plus que quelques mois à vivre. Toutes les thérapeutiques usuelles n’avaient eu aucun effet sur la maladie. De la chimiothérapie à l’hormonothérapie en passant par la radiothérapie, les traitements n’avaient rien donné.
Face à cette impasse thérapeutique, son praticien traitant ne lui a proposé que des soins palliatifs de fin de vie. N’ayant plus grand-chose à perdre, la patiente s’est présentée à l’essai clinique où des cellules de sa tumeur ont été prélevées puis cultivées. Les chercheurs dénichèrent pas moins de 62 mutations différentes. Ils testèrent dès lors différents lymphocytes produits par l’organisme de la patiente afin de déterminer lequel agissait le plus efficacement contre sa tumeur. Ceux-ci ont ensuite été multipliés puis injectés à la malade. Aussi spectaculaire que cela puisse paraître, les lymphocytes ont attaqué la tumeur et ses différentes localisations secondaires. La tumeur et ses métastases furent totalement détruites et depuis 22 mois la patiente n’a connu aucune rechute.
Le second groupe témoin était constitué de deux patients. Atteints l’un d’un cancer du foie et l’autre d’un cancer colorectal. La particularité de ces trois cancers (sein, foie et colorectal) étant qu’il s’agit de cancers épithéliaux. Autre groupe, mêmes résultats. Après quelques mois de traitement les deux patients ont été déclaré guéris en 2014 et 2016. Et depuis aucune rechute de la maladie.
Quelles sont les perspectives ?
Les travaux de l’équipe du docteur Rosenberg ont été présentés au Congrès mondial de cancérologie qui se tient depuis quelques jours à Chicago. Ils réaffirment l’efficacité incomparable de l’immunothérapie dans la lutte contre le cancer. Le but étant maintenant de trouver des voies et moyens pour améliorer et pourquoi pas démocratiser le procédé.
En effet, si elle a sauvé trois vies l’approche du docteur Rosenberg est encore expérimentale. Elle se doit donc d’être validée par les autorités sanitaires.