Confrontée à une maladie ultra résistante provoquée par un champignon, la plus répandue des bananes pourrait bien être amenée à s’éteindre.

C’est la Food and Agriculture Organization (FAO), autrement dit l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture, qui a lancé l’alerte. En l’espace de quelques mois, les continents asiatiques, australiens ou encore africains, ont vu pas moins de 100.000 hectares de bananeraies décimées. En cause, le champignon Tropical Race 4 (TR4), qui provoque une maladie cryptogamique particulièrement virulente nommée maladie de Panama et pour laquelle aucun antidote n’existe à l’heure actuelle. Traversant les continents de manière fulgurante, il menace désormais l’Amérique latine, premier producteur et exportateur mondial de la banane du sous-groupe variétal Cavendish.

Une pathologie végétale ayant resurgi sous la forme d’une nouvelle souche

La banane Cavendish est aujourd’hui l’espèce la plus répandue au monde puisqu’elle représente 97% du marché international. Elle a remplacé la Gros Michel, dont la production a fini par s’effondrer dans les années 1960 suite à l’attaque foudroyante de la même maladie. Seules quelques exploitations antillaises ou d’Afrique centrale isolées continuent d’en produire aujourd’hui.

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Symptôme de la maladie de Panama du bananier (vue en coupe) – Crédit photo: Wikimedia – Dr Luadir Gasparotto

Popularisé pour sa plus grande productivité et sa résistance à la maladie de Panama, le cultivar Cavendish n’est ni plus ni moins qu’un clone, tout comme le TR4 (souche VCG01213) qui est la réplique parfaite de la maladie de Panama originelle. En sa « qualité » de clone, le fruit se trouve dépourvu de diversité génétique, si bien qu’il ne peut développer aucune résistance aux nouvelles maladies et que l’intégralité des plantations est rendue vulnérable, d’où le risque d’extinction ou tout du moins de déclin massif si rien n’est fait pour arrêter ce fléau.

Parti d’Indonésie, le champignon gagne du terrain et met à présent en péril l’Amérique du sud, qui domine de loin l’économie mondiale (82% de la production et 60 % de la commercialisation).

Un parasite résistant aux fongicides

Découverte dès 1876, la maladie de Panama ne fut attribuée au champignon Fusarium oxysporum que 30 bonnes années plus tard. Pouvant rester en dormance dans le sol durant plusieurs décennies, ce dernier infecte les bananiers par la racine et remonte jusqu’aux principaux vaisseaux chargés d’hydrater la plante, après quoi celle-ci dépérit rapidement puis finit inévitablement par mourir. Le problème, c’est qu’il n’existe aucun traitement préventif ni curatif, et encore moins de tests permettant une détection précoce de la maladie. C’est justement ce à quoi planchent les chercheurs, de façon à pouvoir éradiquer tous les bananiers contaminés et ainsi limiter la propagation.

Comme il l’a été pour la banane Gros Michel de par le passé, il est prévu de remplacer la variété Cavendish pour ne pas risquer de voir la banane disparaître, ce qui prendra des années et coûtera très cher en terme de recherche et de développement. Les expérimentations n’en sont pas à leur coup d’essai, avec la conception en 1995 de la Goldfinger, une banane hybride plus tenace, mais supportant très mal le transport et… autre problème de taille: son goût s’apparenterait à celui de la pomme !

Maladie de Panama: une arme de destruction massive générée par l’homme ?

Volonté d’obtenir des variétés toujours plus résistantes et adaptées à l’exportation (cueillies vertes afin d’arriver belles et fraîches sur nos étals, après un protocole de mûrissement forcé), injection d’engrais azotés pour contrecarrer l’appauvrissement des sols résultant de la monoculture et de la course effrénée à la production massive et intensive, épandage de pesticides donnant lieu à des parasites contre lesquels il est de plus en plus difficile de lutter, sans oublier le phénomène de standardisation qui vise à respecter un calibre et une apparence prédéfinis…

L’uniformisation des cultures portée par l’agriculture industrielle détruit la biodiversité à petit feu et laisse peu de chance à la nature de pouvoir se défendre. La solution ne tiendrait-elle pas dans une agriculture responsable et raisonnée ainsi que dans la réintroduction de variétés multiples, et ce avant d’arriver à un point de non retour ? Pour rappel, la filière bananière est un marché qui représente pas moins de 36 milliards de dollars par an.

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Crédit photo principale : Wikimedia – The Photographer

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Jessica, journaliste aguerrie avec une solide expérience en gestion de projet et rédaction web, est diplômée de Sciences Po en Communication et Médias. Elle capte l'attention par des contenus précis et percutants, couvrant les évolutions médiatiques avec rigueur et clarté. Contact : [email protected].

Un commentaire
  1. il y a plus de 1000 espèces de bananes! si au moins on avait diversifié et pas utilisé tous ces produits chimiques!!! les bananes seraient résistantes naturellement et surtout l’expansion serait limitée…

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