Deux recettes de chocolat futuristes tentent de concilier plaisir gustatif, éthique et respect de l’environnement. L’une d’elles propose un chocolat utilisant l’intégralité du fruit du cacao, tandis que l’autre parie sur une composition sans cacao. Mais laquelle de ces innovations saura séduire les amateurs de chocolat ?
Un chocolat bon pour la santé et pour les cultivateurs
Les préoccupations environnementales et sociales liées à la production de cacao ont poussé plusieurs chercheurs et ingénieurs à imaginer le chocolat de demain. Une de ces initiatives innovantes provient de l’école polytechnique fédérale de Zurich. En collaboration avec la startup Koa et le chocolatier suisse Felchlin, cette équipe travaille sur un chocolat utilisant l’intégralité du fruit de cacao.
Traditionnellement, seul le plan des fèves de cacao est employé dans la fabrication du chocolat. Cependant, cette nouvelle méthode inclut la chair et des parties de l’enveloppe du fruit, transformées en poudre pour préparer une « gelée de fruits de cacao ». Cette gelée remplace le sucre en poudre souvent dérivé de la betterave, réduisant ainsi la teneur totale en sucre et augmentant la valeur nutritionnelle du chocolat.
Selon Kim Mishra, principal auteur de l’étude qui a conduit à cette avancée, cette méthode offre aussi un avantage économique aux petits agriculteurs de cacao. En exploitant l’intégralité du fruit, les cultivateurs peuvent diversifier leurs sources de revenu. « Nous devons néanmoins adapter toute la chaîne de création de valeur, notamment en dotant les cultivateurs de cacao d’installations de séchage adaptées », précise Mishra.
Malgré ces défis, l’équipe a réussi à démontrer que ce chocolat novateur offre une expérience sensorielle comparable à celle du chocolat classique. De plus, un brevet a été déposé pour cette nouvelle méthode de production. Reste à voir si cette innovation séduira les consommateurs lorsqu’elle sera commercialisée.
Du chocolat sans cacao
Parallèlement, à Londres, la startup Win-Win a opté pour une approche radicalement différente : un chocolat totalement dépourvu de cacao. Fondée il y a trois ans, cette entreprise ambitionne de conduire la prochaine révolution alimentaire en développant des ingrédients qui combinent saveur, durabilité et éthique.
Pour fabriquer leur substitut de chocolat, Win-Win utilise des céréales et des légumes, les soumettant à un processus de fermentation semblable à celui utilisé pour traiter les fèves de cacao. « L’expérience de dégustation est en tout point similaire à celle du chocolat conventionnel, aussi bien en termes de goût, de texture et d’odeur », assure Ahrum Pak, directrice générale et cofondatrice de Win-Win.
L’attrait de cette innovation n’est pas passé inaperçu ; le groupe Mondelēz, géant de l’industrie alimentaire, a intégré Win-Win dans son accélérateur de projets innovants, baptisé CoLab Tech. Les avantages de ce chocolat sans cacao sont multiples : réduction des problèmes liés à la déforestation, lutte contre le travail des enfants et amélioration des conditions de vie des agriculteurs.
Les implications pour la filière cacao
Ces deux approches innovantes soulignent la complexité des enjeux associés à la production de cacao. La solution de l’école polytechnique fédérale de Zurich conserve le lien avec la culture traditionnelle du cacao tout en maximisant l’utilisation du fruit. Elle offre une option potentiellement plus éthique et durable, enrichissant la valeur nutritionnelle du chocolat et supportant directement les cultivateurs.
De son côté, Win-Win propose une rupture totale avec le modèle existant, en supprimant complètement le besoin de cacao. Cette méthode présente l’avantage d’éliminer les problèmes écologiques et socio-économiques associés à la culture de cacao, mais pourrait rencontrer une résistance auprès des puristes du chocolat.
Quelle option séduit le plus ?
Chacune de ces innovations représente un pas en avant dans la quête d’un chocolat plus éthique et durable. Cependant, leur adoption dépendra en grande partie de la perception des consommateurs. Ils devront décider s’ils privilégient un chocolat qui conserve ses origines – mais avec des améliorations significatives – ou s’ils préfèrent un produit entièrement reformulé, sans lien avec l’arbre du cacao.
Ces initiatives incitent à réfléchir sur l’avenir de l’industrie du chocolat. Les consommateurs sont-ils prêts à adopter ces nouveaux produits pour les bienfaits environnementaux et sociaux qu’ils promettent ? La tradition du chocolatier pourra-t-elle s’effacer devant les impératifs éthiques et écologiques ?