Il y a quelques jours, nous avons évoqué l’agonie d’un ours polaire sur l’île de Baffin. Depuis, le fait a été largement relayé et débattu par des experts. Faisons dès à présent le point sur les conclusions qui peuvent être faites à ce jour.
L’histoire de l’ours polaire de Baffin
L’ours polaire amaigri mort sur l’île de Baffin au Canada avait été filmé par Paul Nicklen, un photographe amoureux de la nature et des grands espaces. Dans cette affaire, ce dernier travaillait pour SeaLegacy. Il a été particulièrement choqué par la scène à laquelle il a assisté, et nous pouvons le comprendre. L’enregistrement de la mort d’un ours en direct est un précédent. Le voici :
https://youtu.be/ErvCkkWYs5Q
Les images ont fait le tour du monde et nombre de commentateurs ont imputé cette disparition spectaculaire à la faim et donc, indirectement, aux changements climatiques. Cependant, ces derniers jours ont été l’occasion de nouveaux rebondissements. La vidéo de l’agonie a été décortiquée et analysée par des experts de tous pays. La plupart des avis invitent à relativiser l’importance du climat dans cette mort, bien que les causes de cette dernière ne puissent faire que l’objet d’hypothèses.
La co-fondatrice de SeaLegacy (organisme ayant rémunéré Paul Nicklen), Cristina Mittermeier, vient elle-même de reconnaître qu’aucun lien objectif ne pouvait être établi entre le climat et la mort de cet ours. Il est incontestable que l’ours polaire en question était décharné. Avant de s’éteindre rapidement, il cherchait de la nourriture dans des déchets. C’est ce qui avait dans un premier temps accrédité la thèse de la mort de faim. Toutefois, les scientifiques affirment qu’il serait nécessaire de pratiquer une autopsie pour affirmer une telle chose.
De quoi l’animal est-il mort ?
Il est impossible de donner une réponse univoque. En effet, nous ne pouvons parler pour l’heure que de probabilités. Le spécialiste Jeff Higdon rappelle que Paul Nicklen aurait normalement dû alerter les services vétérinaires canadiens, lesquels auraient pu faire une autopsie. Ce manquement, s’il était volontaire, pourrait mettre en doute la fiabilité du photographe. De plus, la vidéo a été prise en août, d’où l’absence de neige. Sa diffusion en décembre ne l’a pas assez rappelé, voire pas du tout, ce qui a fait croire à l’opinion publique que les images étaient très récentes.
Scientifique de Polar Bear International, Steven Amstrup a rappelé que la mort par malnutrition des ours polaires était courante, et ce même avant que l’on parle de réchauffement climatique. En effet, cette mortalité compenserait la quasi-absence de prédateurs. Il est donc possible que l’ours de l’île de Baffin eût connu une agonie liée à un âge avancé ou à une maladie. Très jeune, il pourrait au contraire avoir été privé de nourriture par ses congénères. Enfin, les images proviennent d’une région où la population d »ours polaires est stable voire en augmentation. Si le climat local entraînait la malnutrition et la mort des ours, celui qui a été filmé par Paul Nicklen n’aurait pas été le seul.
Aussi, la diffusion de cette vidéo dans le but d’émouvoir l’opinion au sujet du climat pourrait en fin de compte avoir un effet contraire à celui qui était recherché. Il est bien évident que ce dénouement inattendu ne doit rien changer aux comportements éco-responsables. Nous avons en effet toujours quelque chose de plus à faire pour respecter la planète !