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Le 28 janvier 2025, une décision de la cour d’appel de Pau a marqué un tournant significatif pour la protection de la biodiversité marine dans le Golfe de Gascogne. En confirmant la suspension des travaux de bathymétrie liés à l’interconnexion électrique sous-marine entre la France et l’Espagne, cette décision met en lumière les insuffisances d’une étude d’impact controversée réalisée par RTE. Cette affaire, qui a suscité un large débat, souligne l’importance cruciale de prendre en compte les impacts environnementaux des grands projets d’infrastructure, en particulier ceux qui touchent des habitats marins sensibles.
Une étude d’impact critiquée
Depuis son lancement, le projet d’interconnexion sous-marine porté par RTE a été l’objet d’une forte opposition. Doté de 3,1 milliards d’euros, ce projet a été critiqué pour de nombreuses insuffisances, comme l’avis négatif du Conseil National pour la Protection de la Nature (CNPN). L’étude d’impact a été jugée lacunaire, avec des mesures de compensation jugées faibles et une violation du principe de précaution.
En août 2024, le tribunal de Bayonne avait déjà ordonné la suspension des travaux de bathymétrie. Il était demandé à RTE de fournir une nouvelle étude d’impact et de créer une zone d’exclusion pour protéger les mammifères marins. Malgré la contestation de cette décision par RTE en appel, la cour de Pau a maintenu la suspension, pointant du doigt l’insuffisance des éléments fournis par l’entreprise. Cette affaire soulève des questions essentielles sur la responsabilité des entreprises dans la protection de l’environnement et les attentes croissantes de la société civile quant à l’intégrité des études d’impact environnemental.
Des impacts sous-estimés sur les mammifères marins
L’étude réalisée par RTE avait initialement conclu à une absence d’impact des travaux sur les mammifères marins. Cependant, la cour d’appel a relevé plusieurs omissions majeures, notamment l’absence de prise en compte des effets cumulés des pollutions sonores générées par les travaux de bathymétrie. Cette négligence a des conséquences graves pour les espèces marines.
En particulier, l’émission sonore du ROV, un petit sous-marin opérant autour du bateau, n’avait pas été intégrée à l’étude d’impact. Ces omissions rendent l’étude incomplète et non fiable, selon le juge. Il a été confirmé que les mammifères marins de la région sont perturbés dans leurs activités essentielles comme le nourrissage et la communication. Ces perturbations mettent en évidence la nécessité de revoir en profondeur les méthodes employées pour évaluer l’impact environnemental des grands projets industriels. La protection de la biodiversité marine est un enjeu crucial qui ne peut être pris à la légère.
Une raréfaction des cétacés observée
Les données collectées par plusieurs associations, telles que Sea Shepherd France, Landes Aquitaine Environnement et Défense des Milieux Aquatiques (DMA), ont joué un rôle déterminant dans la décision de justice. Apex Cetacea a documenté une raréfaction notable des mammifères marins pendant les travaux, en particulier la disparition des grands cétacés du gouf de Capbreton, notamment des cachalots.
Des comportements anormaux ont également été observés chez les individus restants, certains étant aperçus isolés et errants dans la zone. Ce phénomène peut être interprété comme un signe de stress acoustique ou une perturbation de leur orientation naturelle. Ces éléments soulignent l’impact profond que peuvent avoir les projets industriels sur des espèces déjà fragilisées par d’autres menaces environnementales. Il est impératif de prendre en compte ces observations pour éviter des conséquences irréversibles sur la faune marine.
Un manque de mesures de précaution et de compensation
Le juge a critiqué l’absence de mesures de réduction et de compensation adaptées à l’ampleur des impacts environnementaux. L’IUCN a désigné le gouf de Capbreton comme une zone de protection forte, essentielle à la survie des cétacés. Pourtant, aucune réelle stratégie n’a été mise en place pour minimiser l’impact des travaux sur ces espèces strictement protégées.
Cette critique met en lumière un manque de volonté évidente à prendre en compte les recommandations scientifiques pour la protection de la biodiversité. L’absence de mesures compensatoires adéquates est d’autant plus préoccupante qu’elle pourrait encourager la répétition de tels manquements dans d’autres projets. La nécessité d’une approche plus rigoureuse et proactive est évidente pour garantir la protection des espèces vulnérables en milieu marin.
Des conséquences sur d’autres espèces fragiles
Outre les mammifères marins, d’autres espèces vulnérables sont concernées par le projet. Les poissons migrateurs amphihalins, comme le saumon Atlantique et l’esturgeon d’Europe, utilisent les champs magnétiques terrestres pour retrouver leurs rivières natales. Les lignes électriques sous-marines généreront des champs magnétiques susceptibles de perturber leur orientation.
Ces perturbations ajoutent une difficulté supplémentaire à la survie de ces espèces. En effet, l’interférence avec les champs magnétiques pourrait altérer leur capacité à naviguer, compromettant ainsi leur cycle de vie et, en fin de compte, leur existence même. Ces préoccupations mettent en évidence l’importance de développer des technologies moins intrusives et plus respectueuses de l’environnement pour répondre aux besoins énergétiques croissants de la société.
La décision de la cour d’appel de Pau représente un pas important vers une prise en compte plus sérieuse des enjeux environnementaux dans le cadre des grands projets industriels. Cependant, elle soulève également de nombreuses questions sur la responsabilité des acteurs impliqués et la nécessité de réformer les pratiques actuelles. Comment pouvons-nous garantir que la protection de la biodiversité marine ne sera plus reléguée au second plan à l’avenir ?
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Un grand merci à la cour d’appel de Pau pour sa décision. C’est un vrai soulagement de voir que la protection de la biodiversité est enfin prise au sérieux. Espérons que ça serve d’exemple pour d’autres projets futurs !
3,1 milliards d’euros… Combien de dauphins auraient-ils pu sauver avec cet argent si ça avait été utilisé pour des mesures de protection directe ? 🤔
Je suis perplexe. Suspendre les travaux, c’est bien, mais combien de temps cela va-t-il durer, et quelles sont les garanties pour un vrai changement ?
Et si on demandait aux cétacés ce qu’ils en pensent ? 😜 Blague à part, c’est triste de voir à quel point les grandes entreprises peuvent ignorer les impacts environnementaux…
Je ne comprends pas pourquoi RTE n’a pas pris en compte tous ces impacts dès le départ. C’est un peu irresponsable, non ? Les études d’impact ne devraient-elles pas être plus rigoureuses ?