Fonte des glaciers, disparition progressive du manteau neigeux, épisodes d’inondations et de sécheresse récurrents… Le réchauffement climatique transforme inéluctablement les écosystèmes de nos montagnes et ses conséquences sur nos vies sont considérables. Mais à quoi ressembleront nos montagnes alpines en 2050 ?
Fonte des glaciers
Les glaciers des Alpes français subissent des transformations inquiétantes. La Mer de Glace, le plus grand glacier de France, perd inexorablement de son épaisseur, avec une fonte record de 16 mètres en un été seulement. À 1913 mètres d’altitude, la gare de Montenvers pourrait bientôt voir la glace disparaître totalement.
Yann Arthus-Bertrand, célèbre photographe et militant écologiste, exprime son désespoir : « On contemple ça, mais on devrait pleurer. C’est vraiment le symbole d’un monde qui change. »
La dangerosité accrue de l’alpinisme n’est qu’un des nombreux symptômes de ce déclin. On estime qu’il faudra atteindre 3 000 mètres d’altitude en 2050 pour trouver des glaciers significatifs, un phénomène qui bouleversera les activités humaines et la biodiversité dans les montagnes alpines.
Impact sur les ressources hydriques
Un glaçant constat s’impose : 1,5 milliard de personnes dépendent des glaciers pour leur approvisionnement en eau. Selon Delphine Six, glaciologue, les rivières alpines risquent de s’assécher en l’absence de fonte glaciaire estivale, perturbant gravement la biodiversité et l’approvisionnement en eau des nappes phréatiques.
Sécheresse et inondations à répétition
Les lacs alpins ne sont pas épargnés par le réchauffement climatique. Le lac d’Annecy, par exemple, voit son niveau baisser d’environ un centimètre par jour lors des périodes de canicule. Une étude menée par Drias et Météo France prévoit que d’ici 2040, Annecy deviendra la ville la plus touchée par les canicules en France, avec une moyenne de 16 jours de fortes chaleurs par an.
Charlène Descollonges, hydrologue, précise : « La température élevée perturbe tout l’équilibre du lac, provoquant des impacts écologiques significatifs. » Des solutions comme l’hydrologie régénérative ou la gestion collective de l’eau sont essentielles pour ralentir ce phénomène.
Recul du manteau neigeux
La neige est elle aussi en péril. À 1800 mètres d’altitude, la hauteur moyenne du manteau neigeux pourrait passer de 80 à 25 centimètres d’ici 2040. La durée des enneigements hivernaux se réduira considérablement, impactant particulièrement le tourisme et la biodiversité montagnarde.
« Un sol recouvert de neige reflète les rayons du soleil grâce à l’effet albédo, limitant ainsi le réchauffement », explique Marie Dumont, chercheuse au centre d’étude de la neige. Malheureusement, avec des températures en hausse pouvant atteindre +5 degrés d’ici 2100, le manteau neigeux sera de plus en plus rare.
Valérie Paumier, fondatrice de Résilience Montagne, propose de décarboner la mobilité et de rénover les hébergements touristiques pour limiter les effets du réchauffement climatique.
Changement des cultures
Les bouleversements climatiques imposent de nouvelles cultures agricoles. Par exemple, les vergers de clémentiniers et d’oliviers pourraient peupler les montagnes iséroises, alors que les noix de Grenoble pourraient disparaître. Jean-David Baisamy, arboriculteur, souligne : « Nous adaptons nos cultures, en choisissant des porte-greffes plus robustes et des variétés qui fleurissent plus tard. »
Les changements climatiques amèneront les températures méridionales vers le nord, de sorte que Grenoble pourrait avoir le climat de Marseille, et Annecy celui d’Avignon.
Des espèces en danger
Certaines espèces montagnardes, telles que la marmotte et le lagopède alpin, subissent gravement les effets du réchauffement climatique. Le responsable du programme Alpes de WWF France, Jean-Christophe Poupet, alerte sur la nécessité de protéger ces espèces en danger, notamment en cessant de les déranger pendant les périodes critiques de leur vie.
« Il faut réapprendre à coexister entre activité humaine et prédateurs », ajoute-t-il en évoquant des enjeux liés à des espèces comme le loup et le lynx.
Augmentation des risques naturels
La crue des lacs glaciaires et les éboulements deviennent plus fréquents, mettant en péril des milliers de vies humaines chaque année. En 2022, 250 éboulements majeurs ont été recensés dans le massif du Mont-Blanc. Charles Dubouloz, alpiniste, explique : « Les 1.5 degrés de plus, tu ne les ressens pas. Ce sont les crues et les pertes de biodiversité qui rendent visible le réchauffement climatique. »
Si l’adaptation est nécessaire pour continuer à pratiquer l’alpinisme, Xavier Cailhol, guide de montagne et géographe, souligne : « Il faut changer l’imaginaire autour de la montagne. Aujourd’hui, il faut être un peu météorologue, climatologue, et glaciologue pour s’adapter aux nouvelles réalités climatiques. »
Face à ces bouleversements, il est impératif de reconsidérer notre relation avec la nature. Quels seront les moyens les plus efficaces pour garantir la préservation de nos montagnes et de leurs écosystèmes d’ici 2050 ?