De Bernard Madoff, qui vient de mourir en prison, à Moukhtar Abliazov en passant par Arnaud Mimran, les grands criminels financiers – ou accusés comme tel – ne parviennent pas (toujours) à se tirer d’affaire. Portrait de trois figures troubles de la finance.
Bernard Madoff, ou « l’escroc devant l’éternel »
Le 14 avril 2021, nous apprenions la mort de l’Américain Bernard Madoff, devenu avec le temps l’incarnation du crime financier. Pour une fraude totalisant 65 milliards de dollars, le criminel en col blanc a finalement été condamné à 150 ans de prison, lui qui avait réussi à construire une fortune personnelle estimée à 825 millions de dollars. Une peine qu’il purgeait jusqu’ici dans une prison de Caroline du Nord, avant de mourir à l’âge de 82 ans.
C’est en ayant recours à un système fondé sur une vaste pyramide de Ponzi que ce self-made-man, figure importante de Wall Street – il a été président du Nasdaq en 1990 – a construit son « empire ». Le principe : payer les investisseurs en vidant les dépôts des nouveaux clients et en récupérant le capital. Sa parfaite connaissance des mécanismes financiers lui permet de profiter des failles du capitalisme débridé des années 80. Condamné à passer le restant de ses jours en prison, il déclare : « Je laisse la honte en héritage à ma famille ». Quelques années plus tard, ses deux fils trouveront la mort prématurément, l’un en se suicidant, l’autre mourra d’un cancer.
Moukhtar Abliazov, ou le brouillard de guerre
Mais d’autres personnalités sulfureuses connaissent un destin plus clément. Ainsi de l’ancien président de la banque kazakhstanaise BTA, Moukhtar Abliazov, poursuivi par différentes juridictions européennes et qui a trouvé « refuge » en France depuis 2013. Aujourd’hui, l’ex-banquier se dépeint en philanthrope et réfugié politique. Problème : on l’accuse d’avoir détourné, entre 2005 et 2009, pas loin de 7 milliards de dollars au préjudice de la banque BTA et d’avoir commandité le meurtre de son prédécesseur à la tête de la banque.
Cette dernière a mis la main sur des documents attestant de l’existence d’une « myriade de sociétés, plus de 600, créées au Luxembourg, aux Seychelles, aux îles Vierges britanniques. Un gigantesque système de dissimulation auquel Abliazov et ses associés avaient donné un nom de code : ‘The Fog of War’». Depuis, le milliardaire et ancien ministre de l’Énergie du Kazakhstan a été auditionné le 7 octobre 2020 au tribunal judiciaire de Paris, et mis en examen pour « abus de confiance aggravé » et « blanchiment aggravé », puis libéré sous contrôle judiciaire. Selon les experts, ce Madoff d’Asie centrale aurait mis de côté, dans des comptes offshore, de quoi vivre confortablement jusqu’à la fin de ses jours.
Arnaud Mimran, ou le Janus des beaux quartiers
Mais il n’en va pas de même pour tous les financiers aux méthodes troubles. Également accusé d’ « escroquerie du siècle » sur le marché des quotas d’émissions de CO2, l’homme d’affaires Arnaud Mimran a été mis en examen jeudi 15 avril pour l’assassinat de son ex beau-père Claude Dray et de son ancien acolyte : Samy Souied. Il a par ailleurs été condamné à huit ans d’emprisonnement pour la fraude à la TVA sur le marché des droits à polluer. Last but not least, Arnaud Mimran doit comparaître prochainement aux assises pour l’enlèvement et la séquestration d’un financier suisse.
Ce golden-boy, qui a grandi dans le 16ème arrondissement de Paris, diplômé d’un troisième cycle de finance et ami des stars (Patrick Bruel, Gad Elmaleh), n’était pourtant pas dans le besoin. Mais l’appât du gain le conduit à épouser l’une des filles de Claude Dray, un homme d’affaires à la tête d’une fortune immobilière, puis à accumuler les « coups », de poker notamment, et les délits d’initiés, avant d’être mis en examen pour escroquerie, blanchiment et recel d’escroquerie et de passer huit ans en prison. Également inculpé, donc, jeudi dernier dans deux dossiers d’assassinats instruits par la juridiction interrégionale spécialisée (JIRS), Arnaud Mimran ne devrait pas recouvrer la liberté de sitôt…