L’entrepreneur malien a été le candidat-surprise de la dernière présidentielle. Quasiment inconnu du grand public en début de campagne, Aliou Boubacar Diallo s’était imposé comme le troisième homme du scrutin grâce à un discours volontariste, notamment incarné par son projet de lancer un véritable Plan Marshall économique et social afin de guérir les causes profondes de la crise dans son pays. Une idée qui séduit de plus en plus au Mali… et ailleurs.

La guerre contre le terrorisme ne se gagne pas simplement avec des soldats et des fusils. Cette réalité est désormais bien connue, mais cela n’empêche pas qu’au Mali, comme ailleurs, la réponse militaire et sécuritaire au péril djihadiste, soit encore trop souvent l’unique et seule arme dont disposent les démocraties. Avec toujours les mêmes conséquences : une situation qui s’enlise et des groupes armés qui gagnent le cœur des miséreux en leur offrant les services sociaux que l’Etat est incapable de leur garantir.

C’est fort de ce constat qu’Aliou Boubacar Diallo avait construit sa campagne présidentielle lors des élections de 2018. Le natif de Kayes, l’un des rares responsables politiques maliens qui peut encore se rendre dans le centre du pays, avait dressé un constat sans concession de la situation : la guerre contre les terroristes ne peut pas être gagnée si on ne redonne pas espoir et confiance aux populations. Et de proposer une feuille de route pour sortir de l’ornière.

Plutôt que les demi-mesures qui sont proposées depuis six ans comme autant de pansements sur une jambe de bois, Aliou Boubacar Diallo veut prendre le taureau par les cornes. Et n’a pas voilé aux Maliens les difficultés de son plan. La première d’entre elles consiste à lever 15 000 milliards de francs (23 milliards d’euros) sur cinq ans. Pas si facile dans un pays du Sahel ponctionné depuis des décennies par une classe politique vorace.

Mais Aliou Boubacar Diallo croit dans le potentiel économique de son pays, notamment dans le secteur minier et dans les régions aujourd’hui contrôlées par les terroristes. Entre emprunts d’État, appels aux bailleurs, et partenariats privé-public, la tâche pourrait être réaliste selon l’entrepreneur qui est, à titre personnel, l’une des premières fortunes du pays et qui souhaite, à l’image de Bric Talon au Bénin, faire évoluer les mentalités de la fonction publique de l’intérieur.

La deuxième priorité, cruellement mise en lumière ces dernières semaines avec les attaques meurtrières dont ont été victimes les formes armées maliennes, consiste en une réorganisation et une modernisation de l’armée, qui doit disposer des moyens humains et matériels pour triompher de ses ennemis de l’intérieur. Un renforcement de l’appareil sécuritaire que réclament depuis longtemps les alliés du Mali, la France en tête, mais que le président IBK semble incapable de mettre en œuvre.

La troisième priorité du Plan Marshall conçu par Aliou Boubacar Diallo, et c’est ce qui en fait sa spécificité et son attrait auprès de l’opinion publique du pays, c’est une politique volontariste d’investissements publics à destination du nord et du centre du pays (mais pas seulement), afin de créer un environnement économique et social qui éradiquera les djihadistes comme la mauvaise herbe qu’ils sont. Construction de routes. Désenclavement des communautés rurales les plus reculées. Constructions d’hôpitaux, de dispensaires, d’écoles, de centrales électriques, de puits.

La tâche est titanesque, mais possible. Surtout, en montrant les besoins en services sociaux de base que rencontrent ces régions, le plan Marshall d’Aliou Boubacar Diallo permet de mieux comprendre le succès des groupes armés qui sont entrés comme dans du beurre dans ces zones que l’état malien avait laissé en déshérence pendant des décennies. C’est en corrigeant cette injustice historique, en donnant du travail et de l’espoir à ces régions miséreuses, que la guerre contre le terrorisme peut être gagnée au Mali.

Une proposition qui avait permis à Aliou Boubacar Diallo de se différencier au cours de la campagne, et que l’on retrouve désormais dans la bouche de nombreux responsables politiques et de la société civile maliens, mais également des diplomates internationaux qui comprennent bien que la voie du tout sécuritaire est sans issue et que l’avenir du Mali n’est aujourd’hui pas garanti face au poison du terrorisme.

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